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01/07/2015

Ecologie spirituelle (3) : c'est une révolution chrétienne...

 pape françois,encyclique laudato si

...dans l'âme et dans la société :


 

Revenons sur l'aspect révolutionnaire* de l'encyclique. Au § 53, elle appelle à s'insurger contre le « paradigme techno-économique » qui menace de « raser la liberté et la justice ». Au § 231, elle souligne que l'engagement pour le bien commun ne concerne pas seulement les relations entre les individus, mais (citant Benoît XVI) « les rapports sociaux, économiques, politiques ».Dans la section 1 du chapitre 6, le pape écrit :

<< Etant donné que le marché tend à créer un mécanisme consumériste compulsif pour placer ses produits, les personnes finissent par être submergées dans une spirale d'achats et de dépenses inutiles. Le consumérisme obsessionnel est le reflet subjectif du paradigme techno-économique. Il arrive ce que Romano Guardini signalait déjà : l'être humain “accepte les choses usuelles et les formes de la vie telles qu'elles lui sont imposées par les plans rationnels et les produits normalisés de la machine, et, dans l'ensemble, il le fait avec l'impression que tout cela est raisonnable et juste.” Ce paradigme fait croire à tous qu'ils sont libres, tant qu'ils ont une soi-disant liberté pour consommer, alors que ceux qui ont en réalité la liberté, ce sont ceux qui constituent la minorité en possession du pouvoir économique et financier. Dans cette équivoque, l'humanité postmoderne n'a pas trouvé une nouvelle conception d'elle-même qui puisse l'orienter, et ce manque d'identité est vécu avec angoisse... >> 

Ainsi : la vision contemporaine de l'existence (« le consumérisme obsessionnel ») est le « reflet », dans les esprits, du « paradigme techno-économique ».

Devenue la force globale dominante, l'infrastructure économique produit et formate la psychologie des masses. Cette dernière devient ainsi une superstructure  (fabriquée) du modèle économique...

Comment libérer les esprits ? Réponse du pape, dans l'introduction de ce chapitre 6 :

<< L'humanité a besoin de changer ; la conscience d'une origine commune, d'une appartenance mutuelle et d'un avenir partagé par tous, est nécessaire. Cette conscience fondamentale permettrait le développement de nouvelles convictions, attitudes et formes de vie. Ainsi un grand défi culturel, spirituel et éducatif, qui supposera un long processus de régénération, est mis en évidence. >>

Cette « régénération » implique une libération : que nous nous libérions notamment des peurs sur lesquelles règne le système économique.

Les foules d'aujourd'hui ont peur de la « précarité » et de « l'insécurité », dit le pape (§ 204) ; elles ne voient pas que cette précarité-insécurité est créée par le système économique ultralibéral. Et le système les persuade que leur précarité-insécurité s'aggraverait s'il était lui-même mis en cause.

Minorité parmi les foules d'aujourd'hui, nombre de catholiques français et américains croient, eux aussi, que le « paradigme techno-économique » est l'horizon normal de la vie. Certains ajoutent à ce conformisme un réflexe idéologique : ils prennent pour du « marxisme » le fait de critiquer le système économique et, notamment, de constater que le productivisme formate les esprit.

C'est pourtant ce que dit le pape, et avec insistance, en de très nombreux passages de l'encyclique. Laudato Si reprend et développe – avec une puissance de percussion concrète ce que nos bien-pensants atlantiques prenaient pour du « marxisme »*... et qui n'en était pas.

L'encyclique (§ 209) appelle à rompre avec les « mythes de la modernité : individualisme, progrès indéfini, concurrence, consumérisme, marché sans règles... » Ces mythes sont ceux du libéralisme depuis ses origines. L'encyclique nous appelle à nous libérer du libéralisme.

Face à ces mythes, l'encyclique appelle à une « éducation environnementale » (elle ne parle pas seulement d'« écologie humaine ») étendue « aux différents niveaux de l'équilibre écologique : au niveau interne, avec soi-même ; au niveau solidaire, avec les autres ; au niveau naturel, avec tous les êtres vivants ; au niveau spirituel, avec Dieu ».

Ainsi « l'éducation environnementale devrait nous disposer à faire ce saut vers le Mystère, à partir duquel une éthique écologique acquiert son sens le plus profond ». L'écologie humaine comme l'écologie environnementale font partie de l'écologie intégrale, qui est une révolution pour tous et une tâche eschatologique pour les chrétiens.

 

_______________ 

* L'encyclique utilise plusieurs fois le mot « révolution ».

** Le marxisme est bien autre chose qu'une critique du capitalisme libéral. Le cardinal Ratzinger a plusieurs fois souligné que le vice du marxisme ne réside pas dans  cette critique (largement partagée par le Magistère catholique), mais dans l'utopie totalitaire proposée comme alternative. Contrairement au slogan de la droite libérale, le goulag n'est pas « contenu d'avance » dans la critique du capitalisme. En revanche, les délires de la société actuelle étaient contenus d'avance dans le libéralisme.

 

Commentaires

FORMATAGE

> A propos de paradigme techno-économique, lundi soir, sur la 3 un documentaire sur l'agriculture que vous avez peut-être vu, et qui le montrait côté production.
Un des économistes qui commentait les reportages parlait de TECHNOSERVAGE des exploitants agricoles liés à un seul fournisseur d'aliments et à un seul client.
Une chose frappante: on nous présentait un éleveur de poulets en vase clos donc nourris de soja, donc importé, donc OGM, endetté, survivant par le Revenu Social Agricole, survivant aussi d'une tentative de suicide et toujours sous médicaments.
Le pire, stupéfiant: on lui parle des éleveurs bio qui vivent beaucoup mieux financièrement et plus encore qualitativement ; réaction révélatrice de son conditionnement mental: "ce sont des bricoleurs, or il y a dans le monde des foules à nourrir".
Et si les pays destinataires essayaient de se nourrir eux-mêmes ?

PH


[ PP à PH - Ce formatage de victimes vénérant leur bourreau et répétant ses slogans (mensongers), c'est atterrant. ]

réponse au commentaire

Écrit par : Pierre Huet / | 01/07/2015

DE RIRE

> Allez faire un tour par là, vous allez pleurer de rire: http://www.contrepoints.org/category/societe-2/religion-societe-2
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Écrit par : ND / | 01/07/2015

ESPÉRANCE LUCIDE

> Cette encyclique est ahurissante.
1) A travers elle on sent bien que le Vatican est une tour sur laquelle on voit le monde actuel en un coup d'oeil, en passant du monde miniature et presque invisible des fleurs ou de l'eau, jusqu'à l'embrasement des vrais problèmes fort détaillés.
2) des réponses sont proposées à tous les niveaux.
3) mais le plus fort c'est qu'elle est pétrie d'espérance lucide en proposant comme modèle un saint perçu souvent comme un troubadour. Au lieu de se réduire à un énième plan à suivre, l'encyclique exhorte à la louange, à la joie, à la simplicité liée au don. La description du regard des deux François permet de mieux voir le mystère du mal.
Le cardinal Journet demandait à ses élèves de plonger dans le mystère du bien avant d'appréhender celui du mal : ce à quoi les médias ne nous ont pas éduqué (je ne parle pas de ce site bien sûr).
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Écrit par : Théophile / | 01/07/2015

ERREUR COMMUNE

> Le Goulag est bien content d'avance dans l'utopie marxiste. Mais l'erreur, commune à la droite libérale et à la gauche marxiste, est de penser que l'anticapitalisme s'identifie au communisme. Ensuite ceux-ci en tirent la conséquence : nous sommes les seuls porteurs de la justice sociale , l'un par anticapitalisme, l'autre par allégeance au capitalisme (utopie qui apporte le bien sur terre !)
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Écrit par : Ludovic / | 01/07/2015

LIBÉRATEUR

> Le caractère "révolutionnaire" de la nouvelle encyclique découle logiquement du caractère révolutionnaire du christianisme depuis ses origines.
Pour voir la continuité, il suffirait de remplacer "révolutionnaire" par "libérateur", et d'aller revoir dans le Nouveau Testament tous les passages où il est question de liberté ou de libération. Le "Notre Père" se termine par "Délivre-nous du mal", et l'on serait parfaitement fidèle à l'original grec en traduisant "Libère-nous du mal".
Il y a seize siècles, saint Augustin proposait la foi chrétienne aux païens comme une libération: échapper aux faux dieux (en réalité, des démons) qui les asservissaient. Aujourd'hui, face aux idoles libérales du Profit, du Marché et de la Main invisible, le pape François invite à une libération - spirituelle, intellectuelle et, par suite, sociale.
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Écrit par : Jean-Marie Salamito / | 02/07/2015

@ ND

> Est-ce vraiment drôle ? J'en doute "cartésiennement".
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Écrit par : Gérald | 02/07/2015

Les commentaires sont fermés.